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Autrefois la mer nous appartenait...

Actualités poétiques, août 2002 / L. PODKOSOVA

Autrefois la mer nous appartenait

La montagne du silence

demain il ne fera pas soleil
ni mauvais temps
ni tapage morveux
tu sais d'avance
qu'il n'y aucune solution
mais tu n'es guère chagr
inée

Le dernier recueil de la collection "Afrique" des Editions Clapàs est écrit dans un doux murmure et une douce résignation par Youcef Zirem. On ne peut que se féliciter de la venue de cette collection "engagée" qui "donne la parole à ceux que l'on n'entend pas assez, ou du moins dont la voix n'arrive pas jusqu'aux berges de nos écoutes" comme le souligne Marcel Chinonis dans sa présentation.

Youcef Zirem est le septième poète à entrer dans cette nouvelle voix de la poésie. Il clame la guerre, l'exil et le retour au pays, dans ce pays déchiré où "la violence est un océan de furie" et où "la guerre contre les civils (...) est le territoire impossible / du sentiment".

Le langage est-il là pour briser ce silence qui dure depuis déjà trop longtemps ? La poésie offre alors un nouveau règne au monde meurtri du silence qui n'est plus méditation :

Les flots de la berge
Apaisent la douleur
Sous les rochers
Des bruits sourds
Au loin
Un sermon grisâtre
Une ultime plainte
Des nuages inamovibles
Le temps ne vacille pas
Solitaire
La mouette s'élance
Quelques pêcheurs
Admirent son envol
Prisonnière des airs
Où peut-ell
e bien fuir ?

Mais de cette "ballade éclatée", nul ne sortira indemne. Ainsi la guerre reprend de plus belle dans la seconde partie du recueil qui se veut plus violente :

Les exécutions sommaires foisonnent
Face à cette aube infinie
De l'errance tentaculaire
Même des tonneaux
De cette bière pression
Ne me font plus atteindre l'ivr
esse

"Les dernières saisons" clôturent ce beau recueil et installent à nos côtés la personnification de la femme en l'Algérie qui sommeille dans le sang. Est-ce ce pays qui accompagne le poète ? Ou est-ce sa femme qui telle "une vague de marée haute" meurt pour mieux ressusciter ? Les deux images se mêlent et s'emmêlent entre les pages, entre les images marines là où autrefois la mer leur appartenait.

Que nous apprennent donc les vers de Youcef Zirem ? Contre la guerre, oui, existe l'amour mais surtout l'écriture qui a sauvé le poète :

Tu ne veux pas prendre à ce conflit insensé
Ces papiers écrits au quotidien
Te transmettent parfois
Des doses de bonheur
Les nuits sont dans ce cas des ponts vers toi-même
Et c'est le seul cheminement
Qui te semble valable
A l'orée de l'autre mill
énaire

L. PODKOSOVA

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